Un cadeau que je m’empresse de partager : un nouveau livre de Christian Bobin. J’y ai relevé ces quelques passages dans lesquels la poésie permet de pressentir la saveur de l’indicible !
C’est la qualité de notre regard qui nous permet de réenchanter notre vie.
Il parle d’un instant d’émerveillement avec la vue d’un « cheval lourd mastiquant de l’herbe engraissée par des jours et des jours de pluie » lui permettait de contempler un instant « un sage à tête de cheval qui mâchait la lumière verte mouillée de pièces d’or. Cette vision avait quelque chose de religieux. La vie banale était tranquillement soulevée au-dessus d’elle-même (…) Le cheval brun, sa tête plongée dans l’or et les herbes dociles, composait une phrase infiniment rassurante sur la vie (…) le miracle est là, dans la même vue je découvrais un ange mangeur d’étoiles, un moine des heures oisives, la preuve que la vie n’était pas fâchée avec nous, qu’elle n’avait jamais été aussi proche, immatérielle, impalpable, verte et jaune avec son portier nonchalant à tête de cheval. »
« Le miracle arrive (…) quand s’éveille ce qui dormait sous nos yeux »
Ce regard qui transforme un cheval, plus loin un pois de senteur permet le même miracle avec les tâches les plus insignifiantes :
« Faire la vaisselle est une activité métaphysique qui redonne à un morceau de matière un peu de l’éclat du premier matin du monde. » (…) La vaisselle renait deux fois par jour. Son mouvement est celui des marées, une pulsation de l’énigmatique banalité des jours. »
Et au passage son appréciation sur l’impact de la télévision :
« Dans les lointains, une télévision accomplit sa morne besogne comme un bourreau tranchant sans émotion les têtes divines du silence et du songe »
La recherche du paradis, ce n’est pas hier ou demain, mais maintenant, car « C’est par distraction que nous n’entrons pas au paradis de notre vivant, uniquement par distraction ».